L’architecture des maisons éclusières du Canal de Nantes à Brest

Aujourd’hui lieux de vie des éclusiers, lieu d’accueil des voyageurs ou lieu de services, les maisons éclusières participent à l’identité si particulière du canal de Nantes à Brest. Découvrez l’histoire architecturale de ces ensembles.

Si sa réalisation débute les toutes premières années du XIXe siècle, le canal de Nantes à Brest n’est entièrement terminé qu’au début des années 1840. Sa conception est globale, intégrant des travaux d’hydraulique et de terrassement, des ouvrages d’art, des plateaux éclusiers et des lieux de vies pour le personnel chargé de l’entretien et de la manutention des écluses : les maisons éclusières.

Les « plateaux éclusiers » sont des ensembles monumentaux, formés de leurs écluses, de leurs équipements techniques, portes et passerelles, de leurs plateaux de travail enherbés soutenus par des massifs en pierre, de leurs quais et perrés et de leurs maisons éclusières.

L’implantation des maisons éclusières

Les maisons sont implantées le long de la voie d’eau en léger retrait du chemin de halage.

Selon la topographie des sites, un terrain entoure la maison. Il est utilitaire, planté en potager et en verger. Un puits, un four à pain intégré à l’habitation, ainsi qu’un lavoir aménagé dans la rive du canal, permettent de satisfaire aux besoins essentiels de la vie de l’éclusier.

L’architecture initiale des maisons éclusières

Les maisons ont tout d’abord été conçues dans l’esprit de petites habitations rurales : un plan rectangulaire, une pièce à vivre avec cheminée, une petite chambre et des combles.

Les toitures légèrement débordantes, à deux pentes, sont couvertes d’ardoise.

Hormis la maison de l’écluse des Bellions, toutes les maisons éclusières utilisent des matériaux locaux. Les murs sont montés en moellons de pierres dures locales, recouverts d’un enduit lisse, et les encadrements de baies sont réalisés selon les cas en granite, en pierre calcaire, en schiste ou en pierre dure.

Les façades sont lisses, sans décors et les différences de matériaux disparaissaient probablement sous des badigeons de chaux blanche.

La maison de l’écluse des Bellions à Fégréac

L’écluse des Bellions est un cas à part dans le tracé du canal entre Nantes et Redon, puisqu’elle permet la sortie du canal dans la Vilaine et donc un accès possible à l’Océan. Le plateau éclusier est vaste et complexe, et dominé par la silhouette de la grosse maison éclusière. Bâtie sur deux niveaux pour le service des ingénieurs du canal, elle a les proportions d’une grosse maison de propriétaire terrien.

Sa façade lisse est rythmée par les encadrements de ses baies et sa corniche biaise en pierres de granite. Deux hautes souches de cheminée dynamisent la volumétrie de sa toiture en ardoise.

Une aile basse à usage de remise prolonge sur un pignon le corps principal d’habitation. De l’autre côté, un four à pain avec une massive souche de cheminée et sa boulangerie en appentis.

Des architectures néo-classiques

La période de réalisation du canal de Nantes à Brest est contemporaine de celle, dans l’histoire de l’architecture, du style néo-classique.

Né dans la deuxième partie du XVIIIe siècle en réaction aux complexités des édifices baroques, cette écriture architecturale se développera jusqu’au milieu du XIXe siècle. Elle privilégie les façades lisses, sans décors sculptés, l’ordonnancement régulier des percements et la symétrie des compositions.

Ce style précède le retour, à partir de 1850, à des styles plus décoratifs inspirés des siècles précédents (le néo-gothique ou le néo-Renaissance, le mélange des décors dans des façades dites éclectiques jusque dans les années 1900).

L’intermède néo-classique rejoint la logique des ingénieurs du canal de Nantes à Brest,

qui obéit à une pensée rationnelle et à une volonté de maîtrise des coûts, ce qui n’exclut pas une volonté esthétique basée sur des principes de simplicité et de rigueur.

Les maisons construites à Redon pour l’administration du canal montrent des façades en pierre de taille, à peine ornées de quelques bandeaux en relief ou de corniches moulurées. La maison éclusière des Bellions offre une version encore plus simple, sans moulures ni bandeaux en relief. Les autres maisons éclusières, surtout si on les imagine chaulées de blanc, sont des éléments architecturaux réalisés avec d’une totale sobriété architecturale.

Des extensions successives

Dès 1829, l’exigüité des maisons éclusières amène à définir un principe d’agrandissement : des ailes latérales basses sont ajoutées à chaque pignon, de manière symétrique. Elles complètent la maison par un bûcher et, de l’autre côté par un four à pain et sa boulangerie.

Parfois, une seule aile sera bâtie. Ailleurs, des extensions plus longues seront construites.
Ce sera ensuite au tour du comble de devenir habitable. Une porte-lucarne centrale, sera ajoutée pour permettre d’y accéder grâce à une échelle puis, plus tard, d’un escalier extérieur en bois. Les lucarnes à toitures débordantes sont en brique, avec linteaux de bois peint.

Les maisons éclusières prennent alors leur silhouette caractéristique, globalement préservée jusqu’à nos jours.

 

Des adaptations au cours du XXe siècle

Les petites maisons conçues en 1811 et agrandies en 1829 n’ont progressivement plus répondu aux modes de vie des éclusiers et de leurs familles.

Les ailes à usage initial de bûcher et de boulangerie ont souvent été transformées en pièces habitables. Des extensions arrières en appentis ont parfois été ajoutées aux maisons. Mais, globalement, la petite maison centrale est toujours restée « lisible ».

Dans les années 1980, une malheureuse campagne de rénovation a conduit à la pose d’enduits épais en ciment, qui ont banalisé certaines façades et contribué à la dégradation hygrométrique, donc parfois structurelle, des maçonneries anciennes. Ainsi qu’à une perte de confort due à une condensation intérieure de l’humidité.

Des façades enduites ont alors été peintes en rose, et des menuiseries vernies ton bois, sans préoccupations patrimoniales. On sait en effet que les façades étaient à l’origine dans le ton sable des enduits et dans ceux des pierres, ou peut-être chaulées de blanc. Et que les menuiseries étaient à l’origine peinte d’un ton vert olive.

Depuis peu, le Conseil départemental de Loire-Atlantique a entrepris la restauration progressive des maisons éclusières, avec la restitution des enduits à l’ancienne et des encadrements en pierre. Les menuiseries sont aujourd’hui peintes de couleurs variées, pour l’animation du site et la possibilité d’offrir des repères visuels aux usagers du canal.

Des évolutions à venir

Les maisons éclusières ont aujourd’hui des destins variés. Si certaines ont conservé leur destination première, d’autres accueillent des visiteurs, des hôtes, des clients. D’autres attendent des projets d’occupation.

Des locaux supplémentaires sont parfois nécessaires, pour de nouveaux usages, de nouveaux services. Extensions à la maison, constructions indépendantes, aménagements à créer ? Quels que soient les futurs projets à concevoir, qui apporteront aux écluses du canal de Nantes à Brest de nouveaux lieux de vie et de nouvelles écritures architecturales, il est important que les maisons éclusières conservent leurs silhouettes centrales reconnaissables, axées sur le sas des écluses.

Car elles sont des éléments de patrimoine, les témoignages de la création d’une infrastructure inégalée dans l’histoire de la Loire-Atlantique, et de modestes jalons d’une histoire de l’aménagement et de l’architecture dans l’Ouest de la France dans les premières décennies du XIXe siècle.

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Les maisons éclusières vous accueillent

Certaines maisons éclusières situées le long du Canal de Nantes à Brest ouvrent leurs portes pour se rafraichir, se restaurer ou même y dormir. Propriétaire et gestionnaire du canal de Nantes à Brest dans sa portion de Nantes à Saint-Nicolas-de-Redon et de seize maisons éclusières, le Département de Loire-Atlantique souhaite développer l'attractivité touristique de ces emblèmes de la richesse fluviale et patrimoniale du territoire. L'objectif est de permettre de créer de nouveaux services touristiques indispensables le long de cet itinéraire, mais aussi d’assurer la conservation et la valorisation d’un patrimoine bâti historique du canal. Aujourd'hui, deux maisons ont été mises à disposition de porteurs de projet pour y installer une activité touristique ou culturelle.
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L'histoire du Canal de Nantes à Brest

Avant de partir à l’aventure, quelques lignes d'histoire : le Canal de Nantes à Brest, projet initié par Napoléon Ier en 1804, avait pour objectif historique de relier Nantes aux deux grands ports de guerre bretons : Brest et Lorient. Le 1er janvier 1842, après des travaux longs et difficiles, le canal de Nantes à Brest ouvre à la navigation sur toute sa longueur, soit 364 km et 238 écluses. Cette voie d’eau joua un rôle de tout premier ordre pour désenclaver la Bretagne et permettre ainsi son essor économique. L’appellation « Canal de Nantes à Brest » n’est plus tout à fait exacte aujourd’hui, puisqu’en 1928, un barrage fut construit à Guerlédan interrompant ainsi la navigation en direction de Brest.
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Offices de Tourisme le long du canal

Le Voyage à Nantes

9 Rue des États – 44000 NANTES
0 892 464 044

Erdre Canal Forêt

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02 51 12 60 74

Entre Brière et Canal

Quai St Clair 44530 Guenrouët
02 40 87 68 09

Pays de Redon Tourisme

Place de la République - 35600 Redon
02 99 71 06 04